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Métiers de la couture : l’union fait la force dans le bassin annécien 

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Métiers de la couture : l’union fait la force dans le bassin annécien 

Face à des enjeux partagés dans les métiers de la couture, les entreprises, les collectivités et les écoles du bassin annécien s’unissent sous l’impulsion d’OSV pour co-construire des solutions durables. Le premier pas d’une démarche ambitieuse pour faire du territoire un pôle de référence dans la couture outdoor. 

Un constat partagé : des besoins récurrents, des solutions isolées 

Dans les coulisses de l’industrie outdoor, un savoir-faire perdure, essentiel mais souvent discret : celui des métiers de la couture. De la confection de vêtements techniques aux sacs à dos, en passant par les tentes ou les accessoires, ces métiers sont au cœur de la fabrication de produits outdoor performants, durables, et adaptés aux terrains les plus exigeants. Pourtant, malgré leur importance, les entreprises de la filière se heurtent à des obstacles similaires depuis plusieurs années : recrutement difficile, formation longue, saisonnalité marquée et coûts matériels élevés. 

C’est à partir de ce constat, nourri par de nombreux échanges avec les entreprises du secteur, qu’Outdoor Sports Valley (OSV) a décidé d’agir. L’association, connue pour son rôle fédérateur dans l’écosystème outdoor, a lancé en 2024 un groupe de travail dédié aux métiers de la couture, avec un objectif clair : mutualiser les idées, les besoins et les ressources pour faire émerger des solutions collectives.

«  Lors de nos entretiens avec les entreprises, un schéma s’est rapidement dessiné. Toutes ou presque rencontrent les mêmes difficultés, mais faute de temps ou d’occasion, elles n’échangent pas entre elles. Notre rôle, c’est justement de créer ces synergies. » explique Guillaume Bouvaist, responsable relations adhérents OSV.

Un mode opératoire : co-construction et dialogue entre pairs 

Le projet, lancé dans le bassin annécien – territoire historiquement riche en savoir-faire textile – repose sur une méthode simple et efficace : faire se rencontrer les acteurs concernés pour construire une réponse commune. OSV a donc initié une série de rencontres réunissant entreprises, collectivités territoriales, établissements scolaires et organismes publics. 

Parmi les entreprises participantes, on retrouve des noms bien connus du secteur : Millet, Salomon, Green Wolf, Jonathan & Fletcher, Cilao, Samaya, Rip’Air, ou encore All Triangles. Elles sont rejointes par des acteurs institutionnels comme Grand Annecy, France Travail, et le Lycée Germain Sommeiller. 

Au cours de ces rencontres, trois grandes problématiques ont émergé de manière récurrente : 

  1. La saisonnalité des emplois dans la couture outdoor, 
  2. Le coût et l’accessibilité des machines de production, 
  3. La formation et la transmission des compétences. 

Premier chantier : lutter contre la précarité saisonnière 

Le premier axe de travail a porté sur un sujet sensible : la saisonnalité de l’emploi. Dans l’industrie outdoor, les pics de production ne coïncident pas toujours avec ceux du textile traditionnel, ce qui entraîne des périodes d’inactivité pour les couturier·e·s, parfois sur plusieurs mois. 

Pour répondre à cette problématique, OSV a sollicité l’expertise de Jean-Marc Reydet, directeur de l’association ALPEGE, spécialisée dans la mise en relation d’employeurs saisonniers pour le partage de personnel. Le concept : mutualiser les contrats de travail entre plusieurs entreprises ayant des besoins décalés dans le temps, afin de proposer une activité plus régulière aux salariés. 

Une expérimentation d’un an a ainsi été lancée en Février 2025 avec un groupe d’entreprises volontaires. Elle visera à tester concrètement ce modèle de partage de salariés, à en mesurer les effets sur la satisfaction des employeurs comme des employés, et à évaluer la faisabilité d’une généralisation. 

Une ambition à long terme : devenir un bassin textile de référence 

Au-delà des réponses immédiates, OSV inscrit cette démarche dans une vision à long terme. L’objectif affiché est ambitieux : positionner le bassin annécien comme une référence nationale dans le domaine de la couture outdoor. Un projet qui suppose de structurer un écosystème complet, articulant emploi, formation, innovation et équipement. 

Le tissu local ne manque pas d’atouts pour y parvenir. Plusieurs entreprises du territoire jouissent d’une renommée internationale et d’un savoir-faire hautement spécialisé. Par ailleurs, la région dispose déjà de structures de formation ancrées, comme la filière Outdoor Softgoods Design & Development au sein de l’OSV Academy, ou encore la Formation Complémentaire d’Initiative Locale (FCIL) proposée par le Lycée Germain Sommeiller à Annecy. 

Former les talents : vers un curriculum complet 

La question de la formation des talents est le troisième pilier identifié par le groupe de travail. Dans un secteur où la maîtrise technique est essentielle et où les profils qualifiés sont rares, le développement d’une offre de formation adaptée est crucial. 

Aujourd’hui, plusieurs modules existent déjà, notamment en design, prototypage et développement produit. Mais à terme, l’ambition est de structurer un parcours complet, de l’initiation au niveau supérieur, permettant d’assurer une montée en compétence continue.

L’enjeu est aussi d’attirer de nouveaux publics : jeunes en reconversion, demandeurs d’emploi, professionnels du secteur souhaitant se spécialiser… et de valoriser ces métiers souvent méconnus mais essentiels à la souveraineté industrielle et à l’innovation dans l’outdoor. 

Machines et équipements : une problématique coûteuse à résoudre 

Enfin, le coût d’acquisition et de maintenance des machines est un sujet de préoccupation majeur pour les entreprises. Machines à coudre industrielles, outils de découpe, équipements spécifiques… Ces investissements lourds peuvent freiner le développement ou l’innovation, en particulier pour les petites structures. 

Parmi les pistes envisagées pour répondre à cette problématique : 

  • La mise en commun d’équipements via des plateformes partagées, 
  • Le soutien des collectivités pour l’achat ou la location longue durée de matériel, 
  • L’accès à des tiers-lieux de prototypage ou fablabs spécialisés dans le textile. 

Ce chantier fera l’objet d’une prochaine rencontre, où les entreprises pourront formuler leurs attentes concrètes et étudier les modèles de mutualisation déjà existants ailleurs en France ou en Europe. 

Une dynamique territoriale au service de l’industrie outdoor 

Ce projet illustre parfaitement le rôle d’OSV comme facilitateur de coopération inter-acteurs. En partant des besoins concrets des entreprises, et en impliquant dès le départ les collectivités, les établissements de formation et les services publics, l’association montre qu’il est possible de construire des réponses collectives, innovantes et adaptées aux réalités du terrain. 

La démarche est aussi emblématique d’une nouvelle approche du développement économique local, où la filière outdoor devient un levier d’attractivité, d’emploi et de transition. 

« Ce que nous construisons ici, ce n’est pas seulement une solution ponctuelle. C’est une dynamique. Une manière de faire dialoguer des mondes qui ne se parlent pas toujours, pour inventer des solutions nouvelles », résume Antoine Deniau, chef de projet OSV. 

Et ensuite ? 

Les prochaines étapes sont d’ores et déjà posées. Une nouvelle table ronde sera bientôt organisée pour approfondir les deux autres grands sujets : les machines et la formation. Le retour d’expérience sur l’expérimentation de partage de salariés sera, lui, analysé dans le courant de 2026, afin de décider de son éventuelle généralisation. 

À terme, c’est tout un écosystème qui pourrait être transformé – plus agile, plus solidaire, plus attractif. Une couture, oui, mais collective. Et résolument tournée vers l’avenir. 

 

Ne vous arrêtez pas en si bon chemin